La lutte contre l’antibiorésistance est devenue une urgence croissante pour la santé publique, tant en médecine humaine qu’animale.
En France, le dispositif Calypso impose désormais des obligations strictes de déclaration pour les vétérinaires et les pharmaciens concernant les antimicrobiens. Si ces obligations paraissent techniques, elles visent à renforcer le suivi, la transparence, et adapter efficacement les politiques de santé.
Dans cet article, nous allons être plus précis : quels médicaments sont concernés, quelles espèces, et surtout comment s’étendra progressivement la réforme Calypso.
Le règlement européen (UE) 2019/6 relatif aux médicaments vétérinaires impose aux États membres de collecter et de rapporter des données d’usage des antimicrobiens.
En France, c’est l’ANMV (Agence nationale du médicament vétérinaire), en collaboration avec le CNOV (Conseil National de l’Ordre des Vétérinaires), les pharmaciens, les vétérinaires, les fabricants d’aliments médicamenteux, qui pilotent le système Calypso.
Calypso est opérationnel depuis 2023 pour une partie des acteurs, avec des fonctionnalités qui se développent progressivement.
Tout vétérinaire qui prescrit ou utilise des antimicrobiens doit veiller à ce que la dispensation soit déclarée dans Calypso : lui-même, ou via un pharmacien, selon les cas.
Les pharmaciens d’officine aussi sont concernés : lorsqu’ils délivrent des médicaments comportant une ou plusieurs substances antimicrobiennes destinées à un usage vétérinaire, qu’il s’agisse de spécialités vétérinaires ou de médicaments humains réaffectés.
Les données à transmettre comprennent : espèce animale, quantité de médicament, date, nature du médicament antimicrobien, identité du prescripteur (vétérinaire), nombre d’animaux traités, etc.
Voici le détail des types de médicaments antimicrobiens et des situations couvertes par la réglementation Calypso, ainsi que ce qui n’est pas (encore) concerné.
« Antimicrobien » regroupe toutes les substances actives ayant une action sur les micro-organismes :
Antibiotiques (substances antibactériennes).
Antiviraux.
Antifongiques (antimycotiques).
Antiprotozoaires (par exemple anticoccidiens).
Tous les antimicrobiens soumis à prescription vétérinaire. Cela comprend les spécialités vétérinaires, mais aussi les médicaments humains utilisés dans le cadre vétérinaire (réaffectés) lorsqu’ils contiennent des substances antimicrobiennes.
Préparations magistrales contenant une ou plusieurs substances antimicrobiennes doivent aussi être déclarées.
Bien que la réglementation ne donne pas nécessairement une liste exhaustive publique (au moins au moment de cette rédaction) des “classes critiques” priorisées, certaines substances sont déjà clairement cités dans les communications ou recommandations :
Céphalosporines de 3ᵉ et 4ᵉ générations
Fluoroquinolones
Ces classes sont considérées comme “antibiotiques critiques” par plusieurs instances européennes ou nationales du fait de leur importance pour la santé humaine, et donc soumises à un usage plus encadré. (Ce sont des exemples typiques, et il est probable que d’autres molécules le soient selon les mises à jour).
Les antimicrobiens non soumis à prescription (disponibles librement ou en vente sans ordonnance vétérinaire) ne font pas partie du dispositif de déclaration pour l’instant.
Certains usages professionnels internes par des vétérinaires non ayants droit peuvent avoir des modalités spécifiques : dans certains refuges, haras, zoos, etc., les déclarations sont faites directement par le vétérinaire selon leur statut.
Dès avril 2023, les vétérinaires, les fabricants et les distributeurs d’aliments médicamenteux ont commencé à déclarer leurs cessions d’antimicrobiens via Calypso.
La réforme est désormais en phase d’extension : si dans un premier temps, les espèces d’élevages (animaux de rente) a été priorisé du fait du volume d’antimicrobiens utilisées, désormais les animaux de compagnie sont également soumis au périmètre Calypso.
Les vétérinaires employés, non ayants droit (par exemple dans refuges, zoos, fourrières) sont soumis à une déclaration des usages d’antimicrobiens, mais selon des modalités spécifiques.
Certains dispensateurs ou pharmaciens qui délivrent occasionnellement des antimicrobiens à usage vétérinaire peuvent avoir des obligations allégées (saisie manuelle via le portail Calypso, plutôt qu’automatisation).
Dès que la réglementation entrera dans sa phase pleine, des contrôles seront menés.
En cas de non respect (absence de déclaration, données incomplètes, non conformité des molécules déclarées), des sanctions administratives ou discipline professionnelle peuvent être appliquées, selon les textes nationaux.
Le fait de ne pas disposer d’un logiciel capable de faire les transmissions (ou de ne pas disposer de la mise à jour nécessaire) peut exposer à des risques lors de ces contrôles, d’où l’importance pour les vétérinaires de s’assurer que leur outil logiciel est à jour.
Le logiciel Epivet est qualifié depuis mars 2023 pour la télédéclaration des antimicrobiens vers Calypso. Afin d’être conforme, chaque vétérinaire doit suivre une série d’étapes de paramétrage et d’envoi des données. Voici la procédure complète.
Configuration du cabinet (DPE) : dans Configuration > Paramétrage des sites, il faut saisir le numéro DPE fourni par Calypso et géré par le Conseil Régional. En cas de cabinets multisites, seul le site principal télédéclare pour éviter les doublons.
Configuration des classes d’articles : il faut cocher l’option Déclaration Calypso pour toutes les classes d’antimicrobiens concernées, ou créer une classe d’articles spécifique « autres antimicrobiens » (AATM). Un outil interne (Mises à jour > Maj antimicrobien Calypso) permet de vérifier que vos médicaments concernés sont correctement classés. Il est également possible de télécharger le référentiel des antimicrobiens via l’import du fichier de l’ANMV depuis le menu DMV puis ANMV (les produits affichés en gris sont les produits de la base ANMV qui n’existent pas dans Epivet, et les produits affichés en rouge sont les produits d’Epivet à corriger pour pouvoir les déclarer à Calypso).
Fiches produit : chaque produit doit être rattaché à une classe qui à l’option « Calypso » et disposer d’un code GTIN valide (EAN128).
Fiches client : pour les éleveurs, il faut saisir un numéro EDE, INUAV ou SIRET. Pour les animaux de compagnie, l’adresse postale complète est obligatoire.
Espèces et races : Epivet intègre les codes officiels Calypso (Outils >.Catégories d’espèces Calypso) Il faut renseigner dans chaque fiche espèce et race le code de catégorie et de sous-catégorie (ex. : bovins = BOV, vaches allaitantes = VACA).
Fiches animaux : une fiche générique doit être créée pour chaque troupeau ou catégorie d’animaux, avec les codes Calypso associés. Une fonction de génération automatique facilite cette création (menu Outils > Génération de fiches troupeau).
L’ANMV a proposé le 10 septembre 2025 de nouvelles catégories / sous catégories d’espèces pour faciliter la saisie de cette information par les vétérinaires sur leur ordonnance tout en assurant l’alignement avec la classification européenne.
Lors de la saisie d’une consultation :
Sélectionner un client et un animal (ou troupeau) avec les codes Calypso configurés.
Dans le pavé Actes/Vaccins/Prescriptions, indiquer précisément la quantité délivrée, le nombre d’animaux traités et le produit antimicrobien prescrit.
Vérifier que le praticien responsable est bien un vétérinaire inscrit à l’Ordre, car seule une ordonnance validée par un vétérinaire est recevable.
Aller dans Outils > Export Calypso.
Définir la période (par jour, semaine, mois…) et rechercher les consultations à envoyer.
Cocher/décocher les consultations à inclure. Seules celles qui contiennent au moins un antimicrobien et dont l’espèce est correctement codée apparaissent.
Cliquer sur Envoyer les données : Epivet appelle le webservice Calypso et transmet automatiquement les informations (produits, quantités, codes espèces, numéro d’élevage/SIRET, etc.).
Le logiciel affiche en temps réel le statut de chaque envoi : « Succès » ou « Échec » avec un code erreur si nécessaire (ex. : numéro DPE manquant, code Calypso absent, GTIN non renseigné, etc.)
Une fois les données envoyées :
Chaque consultation validée prend le statut « Déclaration = O ».
Un rapport récapitulatif peut être copié dans un document externe (Bloc-notes, Word).
Epivet permet de suivre quelles consultations ont été transmises et lesquelles restent en attente, garantissant ainsi une traçabilité complète
La réforme Calypso pose des obligations précises et ambitieuses aux vétérinaires, pharmaciens et autres ayants droit. En ce qui concerne les médicaments concernés, le périmètre est large : tous les antimicrobiens soumis à prescription, y compris les préparations magistrales, et cela pour toutes les espèces, avec une attention particulière aux antibactériens critiques.
Sur le plan de l’extension, la réforme s’appuie sur des critères techniques (décrets, capacité logicielle, fréquence de déclaration) et des modalités progressives afin d’assurer que tout le monde puisse se mettre en conformité. Le calendrier est déjà amorcé : depuis 2023 pour certains acteurs, l’extension complète se précise pour 2024-2025.
Pour les vétérinaires, la clé sera de s’assurer que leur logiciel pour vétérinaire est prêt (mis à jour, capable de reconnaître les antimicrobiens concernés, d’envoyer les données correctement). Ainsi, la transition vers une conformité complète sera plus fluide, moins pénible au quotidien, tout en contribuant à un objectif plus large : préserver l’efficacité des antimicrobiens pour les générations futures.
L’équipe Epivet